J.M + J.T
Lecture de l'icône de Notre Mère Sainte Thérèse de Jésus
Carmel de la Théotokos et de l'Unité
LE CENTRE
Géante, à la fois immobile et en mouvement, Thérèse est debout devant le Dieu vivant et vivifiant, Père Créateur signifié par la main bénissante émergeant du cercle de la Lumière Incréée ouvert sur l'infini. La sainte est toute tournée vers cette source de grâce et de lumière, devenue elle-même lumineuse, toute capacité d'accueil. Son visage levé vers le haut, signe de l'inspiration prophétique, ainsi que sa main qui se tend en un geste de supplication, d'offrande et de réceptivité, révèlent cette attitude foncière de Thérèse, maîtresse d'oraison et Mère des spirituels. Dans ce colloque indicible et continu avec un Dieu fait chair qu'elle a contemplé dans le face à face d'une foi confirmée par la certitude de l'amour, elle n'est pas seule. Elle porte avec elle l'humanité entière, l'Église dont elle s'est proclamée la fille.
Les traits du visage cherchent à exprimer l'inexprimable d'une âme aux profondeurs insondables. C'est un mélange de douleur causé par un amour universel et oblatif, une solidarité qu'elle porte comme le Christ – qu'elle appelait le Capitaine de l'amour – dans son corps crucifié et son cœur meurtri: déchirement de ses entrailles devant les malheurs de l'Église pour laquelle elle s'est consumée et qui la firent s'écrier: "Seigneur ayez pitié de tant d'âmes qui se perdent et favorisez votre Église. Ne permettez plus tant de maux dans la chrétienté."
Dès le premier coup d'œil, l'icône donne l'impression que Thérèse va bondir. Ce mouvement, en soi violent et passionné, est atténué par la masse imposante du manteau, par les lignes verticales du Scapulaire et celles en biais de la robe. C'est comme une montée et une descente simultanées. Cet agencement des traits et des couleurs révèlent tout à la fois une attitude de recueillement et une impétuosité mise au service de l'Église et du salut des âmes. Cette vie d'union et de prières se répand dans les âmes d'une multitude de fils qui s'abreuvent à la même source qu'elle.
Le parchemin qu'elle tient, n'exprime-t-il pas ce désir qui l'a hantée: boire avec toutes les âmes à cette source vivante et vivifiante? "Ne me refusez pas cette eau très douce que vous avez promise à ceux qui la veulent"
La Sainte se tient sur une terre verdoyante juste à côté de la source qui jaillit et qui coule. C'est une terre sacrée, un lieu de prééminence. La Madre nous invite à y accéder à notre tour.
LES MINIATURES DE L'ICÔNE DE NOTRE MÈRE SAINTE THÉRÈSE DE JÉSUS
Dans les coins de l'icône, les quatre miniatures représentent les quatre façons d'arroser le jardin selon Notre Mère Sainte Thérèse.
L'âme qui décide d'entreprendre le chemin de l'oraison commence une vie théologale c'est-à-dire fondée sur les trois vertu de Foi, d'Espérance et de Charité. C'est pourquoi dans les quatre miniatures, l'âme est habillée d'une tunique blanche (couleur de la Foi), d'une toque verte (couleur de l'Espérance) et revêtue d'un manteau rouge (couleur de la Charité).
Notre Seigneur qui a le rôle du bon Jardinier est représenté selon l'iconographie byzantine.
Première miniature: Tirer l'eau du puits
Dans la première miniature, nous voyons l'âme dans l'attitude de la Samaritaine. Assoiffée de son Dieu, elle commence à le chercher dans l'oraison à force de bras. Elle tire l'eau du puits, c'est-à-dire qu'elle fait l'effort de recueillir ses sens habitués à se répandre, au dehors, en méditant sur la vie de son Seigneur. Le Divin Maître se charge Lui-même d'arracher les mauvaises herbes.
Il a, dans la miniature, la même attitude que dans l'icône de "la descente aux limbes" du psautier Cotton. Plein de miséricorde et d'amour, tout entier penché vers la misère de l'âme, Il veut la relever.
Deuxième miniature: Tirer l'eau à l'aide d'une noria
La deuxième manière d'arroser le jardin consiste à puiser l'eau à l'aide d'une noria et à la distribuer par des conduits. On obtient ainsi une quantité plus grande, on se fatigue moins et on jouit de quelques intervalles de repos. Ici l'âme commence à se recueillir et touche déjà au surnaturel. L'entendement et la mémoire viennent au secours de la volonté afin qu'elle se rende de plus en plus capable de jouir d'un si grand bien.
Dans la miniature ceci est représenté par sa main ouverte qui reçoit. C'est l'attitude propre de l'orant dans l'iconographie. Elle a les yeux fixés sur Jésus qui ne se manifeste pas encore tout à fait. Derrière la montagne, il tient en main le rouleau des Écritures. Il est Lui-même leur accomplissement. Il donne à l'âme de goûter quelque chose du bonheur de la gloire qui n'est autre que de le connaître, Lui. Ici le jardin commence à fleurir...
Troisième miniature: Amener l'eau d'une rivière
Dans la troisième miniature, nous voyons Jésus et l'âme debout, plongeant le regard l'un dans l'autre. Contrairement aux deux premières miniatures, il n'y a ici aucun mouvement. Dans la troisième manière d'arroser le jardin, en effet, il n'y a presque plus d'effort à faire puisqu'il s'agit de conduire l'eau courante d'une rivière. Cet état est un sommeil des puissances où sans être entièrement perdues en Dieu, elles ne comprennent pas comment elles opèrent. Enivrée de l'eau de la grâce que Dieu lui verse à longs traits, l'âme n'aspire qu'à jouir de cet excès de gloire. Le Seigneur veut qu'elle s'abandonne uniquement à son bonheur. Il ne lui demande qu'un simple consentement aux grâces dont Il la comble et un abandon absolu au bon plaisir de la véritable Sagesse.
Quatrième miniature: La pluie
La quatrième manière d'arroser le jardin est sans comparaison la meilleure de toutes: une pluie abondante. Dieu Lui-même se charge alors d'arroser.
Notre miniature, inspirée de l'icône de l'Ascension, représente deux anges portant les nuages qui font pleuvoir à profusion la grâce sur l'âme. Le Seigneur n'est pas représenté ici pour signifier qu'Il est déjà dans l'âme. Elle et Lui ne font plus qu'Un. Elle jouit d'un bien qui renferme, en lui seul, tous les biens. Toutefois, la nature de ce bien lui est incompréhensible. Tous les sens sont tellement occupés par cette jouissance que nul d'entre eux ne peut, ni à l'intérieur, ni à l'extérieur, s'appliquer à autre chose.
Ici, l'épouse ouvre les bras comme on représente dans les icônes la "Platitéra". En effet, Celle qui contient l'Incontenable, la Mère de Dieu est Mère de cette âme qui la conduit à l'union avec son Fils, faisant d'elle Son reflet. Comme Marie, elle peut à son tour, donner Dieu aux autres.